Discours de la cérémonie des voeux à Villeurbanne

Mesdames,

Messieurs,

Citoyennes, Citoyens,

Villeurbannaises, Villeurbannais,

Camarades, Amis, Bénévoles, Associatifs,

Agents des services publics de l’État, de la métropole et de la commune,

Élu.es de la République,

Mon premier mot pour vous dire merci. Merci d’abord aux bénévoles très nombreux, qui assurent le déroulement de cet évènement à cet instant et qui ont permis sa réalisation. Mais aussi à toute mon équipe parlementaire, qui aujourd’hui comme tout au long de l’année, se plie en quatre pour être au plus près de vos sollicitations et pour rendre confortable mon travail parlementaire.


Merci, parce qu’elle en fait partie, en quelque sorte, avec la cohorte de tous ces militantes et bénévoles qui s’engagent à ses côtés pour des solidarités concrètes. Je veux saluer ma suppléante Melouka Hadj-Mimoune pour son engagement à nos côtés tout au long de l’année.


Ensuite, je souhaite pour 2024, comme chacun de vous, je l’imagine, l’amélioration du sort matériel des classes populaires en souffrance. C’est là, selon moi, le grand, l'indispensable progrès auquel nous devons toutes et tous nous consacrer de toutes nos forces comme femmes et hommes, et pour ma part, de tous mes efforts comme législateur.


Pour vous-mêmes et celles et ceux qui vous sont chers, je présente mes meilleurs voeux de bonne année, que s’accomplissent l’ensemble de ce à quoi vous aspirez.


Je ne pourrais commencer mes voeux sans un mot de solidarité, avec les nombreuses femmes, qui, il y a encore peu de jours, dormaient ici, dans cette même salle depuis le 8 novembre. Et je voudrais dire, en mon nom mais aussi en votre nom, notre entière reconnaissance au collectif Solidarité entre femmes à la rue, qui donne du sens au devoir d’humanité, alors que tout semble s’effriter et que trop souvent l’État se désengage du devoir absolu et incontournable d’humanité et de protection que nous devons aux plus faibles.


Alors qu’un bras de fer était engagé avec la Préfecture du Rhône, et que les pressions de tous côtés s’exerçaient pour expulser ces femmes, les enfants, les nourrissons qui occupaient cette salle, je voudrais tout particulièrement saluer l’action de Mathieu Garabedian, Adjoint au maire, Insoumis, de Villeurbanne, cheville ouvrière d’une mobilisation exemplaire des services municipaux, ayant permis d’aboutir à ce que chacune d’entre elles soient à mise à l’abris à cette heure.


Mais dehors, partout, le froid fait grelotter celles et ceux qui, privés de tout, se retrouvent dans les rues.


Victor Hugo disait dans son discours à l’Assemblée nationale du 8 juillet 1849, je cite : « Il y a des rues, des cloaques, où des familles, des familles entières, vivent pêle-mêle, hommes, femmes, jeunes filles, enfants, n'ayant pour lits, n'ayant pour couvertures, j'ai presque dit pour vêtement, que des monceaux infects de chiffons en fermentation, ramassés dans la fange du coin des bornes, espèce de fumier des villes, où des créatures s'enfouissent toutes vivantes pour échapper au froid de l'hiver. »


Depuis, en 2024, rien n’a changé. Pire, c’est le sarcasme des promesses non tenues, comme celle du Président de la République qui avait promis de sortir les sans-abris des rues dès 2017, qui s’est imposé.


Si cela ne suffisait pas, la réalité des chiffres révèle l’insupportable inhumanité qui s'abat progressivement sur notre peuple. En 2022, au moins 624 personnes sans-abris ou en structures d'hébergement provisoire sont décédées dehors, selon le rapport du collectif Les morts à la rue.


Déjà en 2024, plusieurs corps ont été retrouvés sur les trottoirs, dans les caves, morts, gelés de froid, dans la septième puissance économique du monde. Nous disons que demain, en gouvernant la France en votre nom, nous réquisitionnerons bureaux et logements vides. Honte à ceux qui ne font rien pour les 3 000 enfants qui à cet instant sont dehors.


Dans la métropole de Lyon, je voudrais saluer le travail des collectifs qui agissent comme Jamais sans toit qui a recensé près de 200 enfants sans toit.


J’ai moi-même demandé à la préfète du Rhône d’activer le plan grand froid. Il est temps d’agir, nous ne pouvons supporter plus de morts, alors que partout des logements vacants sont vides.


J’en appelle à la réflexion de tous, quel est le grand péril de la situation actuelle ?


Je crois que c’est l’immobilisme. Il est temps d’inviter à la mobilisation de toutes et tous. L’humanisme l’exige car nous sommes capables de faire autrement.


Je vous propose pour que, ensemble, nous finissions de comprendre la situation, d’écouter des représentantes du collectif Jamais sans toit avec celles qui le font vivre comme Marion Outters et Laurianne Lesenechal, parentes d’élèves à l’école Edouard Herriot et dans la foulée c’est Mathieu Garabedian, qui vous adressera quelques mots.


Marion Outters, représentante du collectif Jamais sans toit :

Bonsoir à tous. Merci de nous accueillir ce soir pour nous permettre de partager avec vous ce qui se passe dans notre école. Laurianne et moi-même sommes parentes d’élèves élues au sein de l’école Edouard Herriot dans le quartier des Gratte-Ciel.


Nous avons été sollicités avant les vacances de Noël par des enseignantes de notre école qui nous ont fait part de la situation d’une famille en grande difficulté. Cette famille vénézuélienne est demandeuse d’asile depuis plusieurs mois. Le papa, la maman enceinte de trois mois, et la petite fille de six ans qui est en CP, sont à la rue depuis quelques temps et aucun hébergement ne leur a été proposé. Ils dorment dehors, malgré le froid.


Laurianne Lesenechal, représentante du collectif Jamais sans toit :

Nous avons pu tout de suite intervenir en leur apportant des vêtements et des couvertures, étant bénévole dans une autre association qui s’occupe de femmes précaires. Les enseignants ont sollicité l'association des parents d'élèves afin que nous trouvions ensemble une solution pour cette famille, pour qu’elle ne passe pas d’autres nuits dehors au vu des températures qui baissent ces derniers temps, et pour que la petite fille puisse apprendre dans de bonnes conditions.


Marion Outters :

La première chose que la famille nous a demandé, c’était de l’aide pour trouver des gants et une cagoule pour pouvoir passer la nuit dehors. C’est dire l’urgence de la situation et l’émotion quand on nous demande ce genre de choses. Très vite, il nous est paru évident de trouver une solution pour les loger, nous familles de l’école Edouard Herriot. Il faut savoir que le 115, le numéro qu’on peut appeler quand on dort dehors, ne propose aucune place pour les familles. À partir du moment où on est une famille, on n’est pas accueillie par le 115. Au niveau du Rhône, il y a seulement quatre places pour les couples. C’est tout. Après ce sont des places pour les femmes ou pour les hommes, seuls.


Nous nous sommes rapprochés du collectif Jamais sans toit puisqu’il y a d’autres familles dans cette situation à Villeurbanne. Cette situation n’est malheureusement pas un cas isolé.


Laurianne Lesenechal :

Le directeur de l’école nous a donné sans hésiter son accord pour héberger la famille dans les locaux de l’école et nous a même proposé une salle, et non le gymnase, car le gymnase était trop froid. La famille est donc accueillie du lundi au vendredi quand il y a école. Les écoles étant fermées le week-end, il a fallu qu’on trouve une autre solution pour les héberger le week-end : on continue d’appeler le 115 tous les jours parce qu’il faut continuer à être dans la démarche pour eux. Plusieurs familles de l’école nous ont rapidement proposé leur aide : pour l’instant on arrive à héberger la famille le week-end. Il y a eu un bel élan de solidarité. Mais là, les vacances vont bientôt arriver et cette famille va être sans solution si elle n’est pas hébergée d’ici les vacances. Pour l’instant, on arrive vraiment à avoir un bon lien avec les familles qui s'organisent pour les accueillir.


Marion Outters :

Cet élan de solidarité est vraiment plaisant à voir. L’enseignante nous a fait part, la semaine dernière, de l’évolution dans le comportement de la petite fille qui était à l’école. Suivre l’école la journée quand on est séparé de ses parents parfois la nuit, qu’on est obligé de dormir dehors, c’est compliqué. Le fait qu’elle soit hébergée à l’école, qu’elle puisse dormir avec ses parents, qu’elle soit hébergée dans les familles de l’école le week-end, ils ont vu tout de suite une évolution dans son comportement. Elle était plus apte à suivre l’enseignement. Et puis surtout, elle s’est mise à sautiller dans les couloirs et à chanter, et ça, ça fait chaud au coeur.


Bien sûr tout n’est pas rose, loin de là, on est encore au début. La prochaine étape qu’on voit arriver, ce sont les vacances où là c’est compliqué puisque l’école est fermée. On a bon espoir de trouver des solutions au vu de l’élan de solidarité qu’il y a au niveau de l’école. Mais surtout, on espère que d’ici là, une solution pourra leur être proposée pour l’hébergement, qu'il puisse y avoir un relais par la préfecture ou l'Office Français de l’Immigration et de l’Intégration. Voilà brièvement notre histoire, nous vous remercions pour votre écoute et nous vous souhaitons une très bonne soirée.


Mathieu Garabedian, adjoint au maire de Villeurbanne :

Bonjour à toutes et à tous. J’ai toujours un peu d’émotion à écouter ces témoignages où l'on découvre l’absurdité du fonctionnement actuel d’avoir des parents et des enseignants qui se disent « il y a un enfant dans la classe de mes enfants qui n’a pas de toit, et il n’y a aucune proposition qui est faite pour y remédier ». On est constamment devant ce mur et les témoignages sont toujours les mêmes. Malheureusement les écoles qui ont été dans cette situation à Villeurbanne sont assez nombreuses et à chaque fois c’est la même émotion d'entendre l’absurdité, l’impuissance que l’on peut ressentir en tant que parent ou enseignant.


Je suis Mathieu Garabedian, adjoint au maire de Villeurbanne et je veux vous dire quelques mots sur les questions d'hébergement et de logement. On vit aujourd’hui une crise nationale majeure du logement. Quatre millions de personnes mal logées, 330 000 personnes sans domicile. Et il s’agit là des chiffres de l’an dernier du rapport de la Fondation Abbé Pierre. On devrait avoir l'actualisation de ces chiffres la semaine prochaine et j’ai peur qu’ils ne soient pas à la baisse.


Chaque année lors des débats parlementaires, on se retrouve avec un budget qui n’est jamais construit à partir des besoins mais seulement avec des moyens qui sont exposés et des critères de vulnérabilités qui sont établis pour les familles.


À l’échelle de la métropole, c’est 14 000 personnes qui sont en attente d’un hébergement via la Maison de la veille sociale. C’est 5 000 personnes de plus qu’il y a deux ans. C’est énorme. Ce sont des dizaines d’enfants chaque soir, qui sont jugés non vulnérables. Leur situation est jugée non vulnérable d’être à la rue.


Évidemment, je salue tout d’abord les actions des collectifs militants qui luttent au quotidien pour le droit des personnes et surtout qui luttent pour que les situations ne soient pas invisibles aux yeux des habitants, mais surtout des gouvernants.


Face à cette crise généralisée, nos députés mènent la bataille et il y a des mesures à prendre : la construction de nouveaux hébergements, de nouveaux logements, la mobilisation des logements vacants.


Il faut rappeler qu’avoir un toit est un droit inconditionnel. Inconditionnel. Tout doit être mis en place afin d’assurer le respect de ce droit. Aujourd’hui, on ne peut que constater la défaillance de l’État face à l’inconditionnalité de ce droit.


La ville n’a pas la compétence hébergement mais elle doit traiter avec la condition du non-logement et du non-hébergement de ses habitants sur la commune. La ville doit quand même assurer le droit à la dignité de ses habitants. Elle doit leur permettre l’accès à l’eau, l’accès à la santé. Et évidemment, quand on a pas de logement, qu’on a pas d’hébergement, c’est rendu beaucoup plus compliqué. C’est pourquoi, on est obligé de s’engager nous aussi en tant que collectivité sur ce sujet. À Villeurbanne, la volonté politique que nous portons est de construire des solutions. Nous essayons de faire notre part.


Quand on a commencé le mandat en 2020 avec l’équipe municipale, une des premières actions que nous avons menées était de signer la Déclaration des droits des personnes sans abri proposée par la Fondation Abbé Pierre. Évidemment il s’agit d’un geste symbolique qui n’ a pas eu d’effet direct pour les personnes, mais il était important de rappeler que ce sont des personnes qui ont des droits qu’il faut que l’on protège au niveau des communes.


Depuis trois ans, nous soutenons les structures d’accueil de jour comme les Amis de la rue, accueil de jour historique. Il y en a des nouveaux qui sont apparus comme le Phare, on a vu réapparaître des bains douches publics sur la ville, l’Archipel qui réfléchit sur les questions d’alimentation et qui a accompagné les camions du coeur pour leur distribution en soirée et qui a mis en place des cuisines pour que les familles ou les personnes qui souhaitent cuisiner, - soit qui sont hébergées à l’hôtel, soit qui sont dans des squat ou des bidonvilles -, et qui n’ont pas forcément accès à des installations, puissent le faire en réservant des créneaux.


Nous avons ouvert des places d’hébergement sur du patrimoine public, ou en lien avec des privés. Nous dépasserons bientôt les 400 places, depuis le début du mandat rien que sur la ville de Villeurbanne. Nous continuons à mener une politique de construction de logement comme on peut dans le contexte actuel et nous nous engageons très fortement pour mobiliser le parc privé et le parc public qu’on aurait pas encore identifié, pour permettre à toutes et à tous d’avoir une solution de mise à l’abri, quand on arrive pas à avoir un circuit classique d’hébergement.


Pour conclure, il nous incombe de proposer des espaces communs entre militants politiques, associatifs, entre les collectivités engagées pour construire ces solutions concrètes, tant que l’État restera défaillant, avec nos moyens, avec toute notre bonne volonté, pour résister aux politiques inefficaces et injustes du gouvernement. Je vous remercie.


Gabriel Amard :

Merci mesdames pour votre témoignage de solidarité concrète. Merci à toi Mathieu, pour l’engagement et au travers de ces remerciements, merci à toute l’équipe municipale et à Cédric Van Styvendael, notre maire, qui vous demande de bien vouloir l’excuser ce soir défendant nos intérêts villeurbannais à une réunion à la capitale.


Être sans feux, sans lieu reste une malédiction de tout temps. Sans toit, qui sommes-nous ? Invisibles pour les autres, parfois pour soi-même. Deux mille personnes par an meurent dans la solitude de la rue.


Cette nouvelle année tout juste commencée, tâchons de penser sans cesse aux plus pauvres, aux plus modestes, afin de construire ensemble l’idéal d’un monde meilleur.


Je veux pouvoir citer François Mitterrand lorsqu’il présentait ses voeux au peuple français en 1981.


« Seule l'histoire pourra dire, avec le recul du temps, la trace laissée par l'année qui s'achève »


Mais chacun de nous sait déjà, comment la fureur des guerres, la résurgence des modèles coloniaux, la prolifération des gouvernements racistes condamnent tant de pays à être victimes de conflits interminables.


Avec la cérémonie de ce soir, je ne peux faire fi de la souffrance de nos frères et nos soeurs en humanité, qui paient toujours à cet instant, le lourd prix des guerres injustes et de tant de crimes cruels.


Souvenons-nous du lourd tribut que payent tant de destins arrachés à leur terre. Des réfugiés mis de force sur les routes du monde, contraints à l’exil. Alors comprenez ma révolte de voir la minorité présidentielle avec la complicité des Républicains et de l’extrême droite, mettre sur pied une loi immigration xénophobe. Depuis hier soir, vous me voyez soulagé d’avoir appris que le Conseil constitutionnel en a censuré plus du tiers. Le signal est peut-être envoyé. Le racisme ne sera jamais constitutionnel.


Dès lors, partout en France, des mobilisations s’organisent à nouveau pour demander le retrait de cette loi qui trahit l’idéal humaniste. Sachez que je les soutiens. Porte étendard de notre nation commune depuis la révolution de 1789, est français celui ou celle qui adhère aux principes liberté, égalité, fraternité. Point barre.


Mais à cet instant, évoquant les malheurs du monde, je veux dire ma honte d’avoir dû supporter depuis le 7 octobre, après des actes d’une barbarie inouïe proférée par le Hamas, impardonnables, comme les crimes de guerre ne le sont jamais. Je veux dire ma honte d’avoir dû supporter le silence complice d’une équipe présidentielle, sur les massacres aveugles commis par l’armée de Monsieur Netanyahou.


Je voudrais dire ma honte de devoir supporter, les injonctions vociférantes et de ces soi-disant experts, experts de tout qui ne trouvent rien à dire quand à Gaza, depuis trois mois, des civils sont massacrés sans discernement.


Face à eux, jamais le groupe Insoumis n’a cédé à la pression de devoir répéter des heures durant un soutien inconditionnel au gouvernement Netanyahou. Car à l’instant même où nous l’aurions fait, nous aurions foulé aux pieds le droit international et avec lui l’espoir de la construction d’une paix durable.


Dès lors et depuis plusieurs mois, nous parlementaires, comme bon nombre de militants des droits humains, nous devons supporter l’offense d’une justice de comptoir en « antisémitisme » et autres accusations mensongères qui sont des aveux d’échecs sur le fond pour quiconque les emplois.


Alors, profitant de cette cérémonie comme d’un appel politique pour que chacun de nous, à son tour, prenne sa part, pour porter le message d’une paix juste et durable. Je voudrais d’abord donner la parole à Jérôme Faÿnel, président du Collectif Palestine 69, mais aussi avec émotion et reconnaissance, pour avoir accepté d’être présente, donner la parole à madame Nicole Kahn, membre de l’Union Juive Française pour la Paix. Si vous voulez bien me rejoindre.


Jérôme Faÿnel, président du Collectif Palestine 69 :

Martin Luther King déclara « nos vies commencent à prendre fin le jour où nous devenons silencieux sur les choses qui comptent ». Nous ne pouvons pas être silencieux, et je sais que vous et les vôtres, cher Gabriel Amard, ne l'êtes pas, silencieux.


Gaza est un champ de ruines. Logements, bâtiments, bâtiments publics, hôpitaux, églises, mosquées, sont détruits pratiquement complètement. Ce sont des crimes de masses. 25 000 assassinés dont 10 000 enfants.


10 000 enfants. À l’échelle de la France, ce serait 700 000 morts. 85% de la population est déplacée. La famine, la déshydratation frappent comme frappent les épidémies. Des enfants aujourd'hui meurent de faim alors que l’aide alimentaire est bloquée à quelques kilomètres. Voici le conflit le plus meurtrier du 21ème siècle, sous les yeux du monde et des victimes qui enregistrent leur propre mort.


Ceux qui témoignent sont exécutés : plus de cent journalistes. Ceux qui soignent sont également exécutés : plus de 326 victimes des personnels soignants, ont péri à ce jour. Ces crimes ont lieu également sous nos yeux mais ont visiblement échappé aux médias audiovisuels. Alors nous convoquons les images d’un passé que nous pensions révolu. Nous exhumons nos livres d’histoire. Guernica, Oradour-sur-Glane, le ghetto de Varsovie. Et pourtant, après le procès de Nuremberg, le monde s’était fait une promesse : « plus jamais ça ! » Et c’est « plus jamais » pour tout le monde. Il n’y a pas de « mais ». Les mots se bousculent et sont à la hauteur des crimes. Ces mots sont durs, glaçants. Crimes de guerre, crimes contre l’humanité, génocide. Ces mots sont à la hauteur du désastre. Génocide.


La convention pour la prévention et la répression du crime de génocide rappelle « c’est la commission de l’un des actes énoncés dans l’intention de détruire en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux ». Nous y sommes.


La Cour internationale de justice, saisie par l’Afrique du Sud, cette fameuse nation arc-en-ciel, aura à se prononcer sur le fond quant au génocide. Mais cela prendra plusieurs années. Des mesures conservatoires, rapides, étaient demandés afin de prévenir le crime de génocide. La Cour, aujourd'hui, vient de rendre sa décision. Elle reconnait le risque sérieux de génocide à travers les actes d’Israël, mais aussi les déclarations de ses responsables. La Cour prend des mesures conservatoires, notamment d’accès à l’aide humanitaire mais n’ordonne pas un cessez-le-feu. Gaza, à ce jour, continue d’être le cimetière du droit international.


Le monde a tenté depuis 1948, d'élaborer des règles et des instruments pour que justice soit faite. Alors, il nous faut lutter pour que soit appliqué ce droit international. Il en va de la marche d’un monde plus juste. Il faut que justice soit rendue au peuple palestinien. Il faut que cesse ce génocide du peuple palestinien. L’urgence reste toujours l’exigence d’un cessez-le-feu permanent. Paix et justice pour le peuple palestinien.


Nicole Kahn, membre de l’Union Juive Française pour la Paix :

Monsieur Herzog qui est le président de l’État d’Israël et qui est réputé être un homme politique plutôt modéré, ce président a déclaré qu' « à Gaza il n’y avait pas de civils, toute la population était responsable de ce qui s'était passé le 7 octobre ». En conséquence, que la guerre devait être totale, et donc qu’il n' y avait pas de civils. Le ministre de la Défense Gallant, est allé devant les militaires et leur a expliqué : « nous combattons des animaux humains et donc nous agirons comme tels ».


En rendant tous les Palestiniens de zéro à cent ans responsables de la même façon, ils nous rendent, ces Israéliens, nous les juifs du monde entier, responsables avec eux de leurs crimes. Également, ils alimentent l’antisémitisme qu’ils prétendent vouloir combattre dans la critique du sionisme.


Nous, à l'UJFP (Union Juive Française pour la Paix), nous militons depuis des dizaines d’années en tant qu’antisionistes pour les droits des Palestiniens. Nous refusons l’assimilation entre Israéliens et juifs. Nous dénonçons cet État raciste, suprémaciste, d’apartheid et maintenant génocidaire. Ceci est contraire à toutes les valeurs qui nous animent, l’antiracisme, des valeurs juives, universalistes, anticolonialistes, nous qui sommes les descendants des survivants du génocide des juifs, qui sommes fils et filles d’enfants cachés pendant la guerre, comme je l’ai été pendant la guerre.


Je voudrais maintenant vous citer ce que dit Jewish Voice for Peace, la voix des juifs pour la paix, organisation américaine antisioniste qui est sur les mêmes positions que nous, qui ont mené des actions formidables pour le cessez-le-feu et contre la politique de Biden. Ils ont occupé la gare principale de New York, ils ont fait une manifestation devant la statue de la Liberté, ils ont été au Capitol. Voilà ce qu’ils disent : « à l’approche de la journée de la commémoration de l’Holocauste, nous sommes confrontés à une vérité dévastatrice. Ce que nous avons juré de ne plus jamais permettre, ce produit en ce moment même ». Ce samedi, Israël et USA partageront des paroles solennelles sur l’Holocauste. Ils nous diront que nous ne devons plus jamais permettre cela.


Je vous citerai pour terminer Marek Edelman qui était le commandant en second de l’insurrection du ghetto de Varsovie et qui disait « être juif c’est être toujours du côté des opprimés et jamais des oppresseurs ».


Gabriel Amard :

Sur ces interventions, je tiens à revenir sur la décision historique d’il y a quelques heures de la Cour international de justice, qui reconnaît très clairement la violence globale que subit le peuple palestinien. Par le fait qu’elle engage la responsabilité du gouvernement Netanyahou dans l’arrêt de ces violences, il incombe moralement et juridiquement à Israël comme à tout autre État signataire de la Convention contre le génocide, d’agir pour faire respecter ses décisions.


Merci à l’Afrique du Sud d’avoir saisi cette Cour qui ordonne désormais au gouvernement d’Israël de prendre toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir et punir l’incitation directe et publique à commettre le génocide. Ainsi, elle désavoue les propos honteux de quelques ministres du gouvernement Netanyahou.


Que s’applique le droit international et les principes ordonnés aujourd’hui même par la Cour internationale de justice, comme celui de prendre, et je cite la Cour internationale de justice, « des mesures immédiates et efficaces pour permettre la fourniture de services de bases et de l’aide humanitaire dont les Palestiniens ont un besoin urgent, pour faire face aux conditions de vie défavorable auxquels ils sont confrontés ». Ce sont les mots de la Cour internationale de justice.


La France doit désormais, par la voix du Président de la République, prendre sa part dans la protection des civils palestiniens et faire triompher les règles de droit.


Mesdames et Messieurs, citoyennes, citoyens, Alors que je me dirige vers ma conclusion, je voudrais dire qu’en France comme dans le reste du monde, l’extrême droite est une menace. Une menace incontestable, à prendre au sérieux.


Nous devons lever nos voix partout, quand en Allemagne les amis de Madame le Pen, l’AFD, mettent sur pied un projet de « remigration » de deux millions de citoyens d’origine étrangère. Ce concept, en France, manié par Éric Zemmour qui soumet même l’idée d’y consacrer un ministère de plein exercice, nous rappelle comment, ces gens font vivre dans notre temps les pires fantômes du passé.


Alors face à ces voix belliqueuses, racistes et antisémites, ne cédons rien. Préservons l’unité du peuple. Faisons France de tout bois pour garantir à chacun sa place dans cette humanité nationale.


Je voudrais ici redire ma solidarité avec les militants des droits humains, qui à Lyon subissent toujours de plein fouet la lâcheté de quelques groupuscules néonazis.


Ici vous pouvez être assuré que je ne tremblerai jamais, pour dénoncer ces actes comme je l’ai fait lorsque les amis du Collectif Palestine 69 ont été lâchement agressés à la maison des passages, comme je l’ai fait en saisissant le Procureur de la République plus tard, pour demander des enquêtes sur les défilés racistes au coeur de nos villes.


Profitant de cette occasion je voudrais, parce que nous sommes à Villeurbanne, et que c’est ici que ce collectif est né, saluer le travail de la Jeune Garde qui mène de front la bataille antifasciste et qui fait vivre l’engagement d’une jeunesse qui n’a pas peur.


Enfin, permettez-moi de vous présenter des sujets d'importance qui devraient toutes et tous nous mobiliser.


D'abord ma fierté d’avoir fait partie des 96 députés qui ont voté dans la nuit de mercredi à jeudi en faveur de la liberté des femmes à pouvoir disposer de leur corps, en faisant ainsi, par notre vote, adopté en première lecture la constitutionnalisation du droit à l’IVG (interruption volontaire de grossesse). C’est une nouvelle victoire, après l’adoption en novembre 2022 de la proposition de loi de Mathilde Panot, ma présidente de groupe à l’Assemblée nationale. D’autres votes vont devoir intervenir mardi à l’Assemblée nationale, puis le texte sera soumis au Sénat. Espérons qu’il sera adopté dans les mêmes termes. Ainsi, le Parlement pourra se réunir en Congrès et devra ainsi ratifier cette sanctuarisation d’une liberté fondamentale pour les femmes à pouvoir choisir. Vous pouvez compter sur ma mobilisation pour ne rien céder, aux idées rances et rétrogrades, qui trouvent encore cinquante ans après la loi Veil, des relais dans notre hémicycle.


Enfin, vient le temps où il va falloir parler des privilèges. Parce que depuis le 4 août 1789, les députés dans l'Assemblée nationale constituante, dans un bel élan d'unanimité, avaient proclamé l'abolition des droits féodaux et des privilèges.


Mais voilà, la nouvelle ministre de l’Éducation nationale s’est affranchie de Parcoursup, laissant de côté les principes d'égalité républicaine. Cette situation n’est pas acceptable. Encore de l’eau qui met à mon moulin pour que nous nous engagions à réfléchir à une nouvelle République dans un processus constituant.


Ensuite j’attire votre attention sur les révoltes qui se lèvent. Des quartiers populaires aux agriculteurs, à chaque fois c’est la justice, la vie chère, la faim qui finalement caractérisent ces mouvements.


Encore, il est essentiel de souligner l'idée selon laquelle « il y a de l'argent, mais pas pour nous ». Cette phrase commune résonne quand il s’agit des agriculteurs, des réfugiés, des travailleurs, des agents des services publics et bien d'autres. Il est temps de remettre en question cette inégalité flagrante et de travailler ensemble pour plus de partage des richesses.


Citoyennes, citoyens, maintenant, il est temps de choisir son positionnement politique.


Nous pouvons opter pour une approche collective, où nous devons récupérer le contrôle sur la richesse produite par tout le monde.


Nous devons réclamer nos retraites volées, remettre en question la facture d'énergie alors que nous avons déjà payé le réseau, exiger que la Politique Agricole Commune finance l’agriculture pour vivre et bien manger au lieu de servir une agriculture d’exportation et demander des comptes à la Commission européenne et à la Banque centrale européenne qui prennent à la gorge nos services publics, nos commerçants, nos artisans, nos entreprises.


D'autres choisiront une approche individualiste et égoïste.


Cependant, quelle que soit notre orientation politique, la ligne de force est claire : nous devons nous emparer de ces sujets.


Avec les élections européennes à l'horizon, je vous propose de porter une attention particulière à « combien nous coûte l'Europe telle qu’elle est aujourd’hui, l’Europe dite libérale ».


Si nous examinons de près la facture d'énergie, l'évasion fiscale, la Politique Agricole Commune non versée à nos agriculteurs, nous réaliserons l'ampleur du prix à payer.


Alors aux élections européennes du 9 juin, ils veulent que vous fassiez un chèque. Moi, je vous appelle à réclamer votre dû, à récupérer cet argent pour le mettre au service de toutes et tous.


Si vous voulez des politiques pour nos services publics, pour réduire le coût de l'énergie ou soutenir une agriculture paysanne bio et vivrière, utilisez vos bulletins de vote ! Et pour ça, je vous invite à vérifier que vous êtes bien inscrits sur les listes électorales. Même quand vous avez déménagé d’un trottoir à l’autre, ou d’une rue à l’autre à Villeurbanne.


Si vous laissez seuls les très très riches voter, ne vous étonnez pas qu'ensuite vous subissiez une politique pour les riches au détriment du grand nombre.


Alors, citoyennes, citoyens c’est l’heure des caractères ! La planète brûle, je vous propose que nous nous fédérions. Lançons un SOS au nom du peuple humain. Pas de place pour l’égoïsme et le chacun pour soi, nous avons ce devoir pour nous même, pour l’humanité tout entière et le vivant.


Vive la République et vive la France.

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